Amour et Psyché
Jacqueline Guillemin
[NS] il y avait bien loin d’ici il y a bien longtemps un roi et une reine qui avaient trois filles les deux aînées étaient belles belles comme des femmes à qui on fait des compliments mais la plus jeune était plus que belle extraordinairement belle si belle que les gens pensaient que sa beauté était surhumaine que sa beauté était sûrement celle d’une déesse peut-être même de Vénus la déesse de la beauté de l’amour Vénus descendue sur terre pour se mêler aux humains ou même elle était si jeune une déesse nouvelle de la jeunesse de la beauté et les gens ont pris l’habitude d’adorer cette jeune fille de lui offrir des prières des cortèges des cadeaux des offrandes et les gens le bruit s’était propagé sur toute la terre les gens venaient de très loin en caravane venaient par bateau des voyages très longs pour adorer cette jeune fille cette nouvelle déesse. mais Vénus elle-même la vraie déesse elle quand elle a appris cette chose qu’une jeune fille mortelle prenait sa place elle s’est dit [end]
[DD] mais moi ? qu’est-ce qui se passe ? et les offrandes les cadeaux sont-elles offertes à la divinité ou à cette fille ? [end]
[NS] et sa haine a grandi elle s’est bien jurée de se venger. pourtant Psyché c’était le nom de cette jeune fille. était très seule et malheureuse on l’adorait mais on ne l’aimait pas. pas d’amis pas de prétendants toujours seule et son père s’inquiétait. son père avait marié les deux aînées à des rois puissants et il se disait [end]
[DD] celle-ci mais c’est une malédiction [end]
[NS] alors il a fait ce qu’on faisait en ce temps-là il est allé voir l’oracle de Millet et il a demandé à Apollon s’il pourrait un jour marier sa fille et Apollon a répondu comme toujours en ce temps-là d’une manière très mystérieuse sa fille il fallait organiser ses noces mais des noces funèbres et en fait qu’elle assiste à son propre enterrement. qu’elle soit conduite sur la falaise et là abandonnée et un monstre cruel et serpentin serait son époux un monstre qui faisait peur aux Dieux comme aux humains le père est rentré bouleversé il est rentré chez lui il a expliqué la chose à sa femme et le malheur s’est su et tout le monde pleurait dans la ville dans le royaume mais l’oracle avait dit c’était inéluctable il a fallu organiser les noces et le jour choisi toute la ville a accompagné Psyché. elle-même et tous les autres étaient vêtues de voiles noirs on avait des torches portées vers le bas couvertes de suie et les chants qui auraient dû être joyeux étaient sinistres des cris et des pleurs si bien qu’en gravissant la montagne Psyché s’est retournée vers ses parents et leur a dit [end]
[DD] pourquoi pleurez-vous maintenant? vous auriez dû pleurer quand on m’adorait quand on me prenait pour Vénus c’est ma beauté qui m’a perdue c’est elle qui est une malédiction gardez vos larmes et rentrez chez vous [end]
[NS] et toute seule courageuse elle a gravi la falaise et elle a attendu. mais là elle était seule elle avait peur elle se demandait quel monstre allait venir la chercher mais pendant qu’elle était au milieu de la foule Vénus avait appelé son fils Amour elle l’avait embrassé follement elle lui avait dit [end]
[DD] il y a une fille qui se prend pour moi c’est elle qu’on adore à ma place et je ne sais pas si les cadeaux sont pour moi ou pour elle. alors venge-moi venge ta mère et toi qui a un carquois et des flèches toi qui sais les lancer sur les humains comme sur les dieux et bien lance une flèche dans son cœur et qu’en face d’elle le premier qu’elle verra soit l’être le plus méprisable le plus infecte le plus malade le plus pauvre le plus loqueteux le plus répugnant. c’est lui qu’elle devra aimer quand tu l’auras touchée d’une flèche et à ce moment-là sa superbe elle la perdra et sa beauté sera malédiction [end]
[NS] mais quand dans la foule Amour a vu Psyché si seule si triste si désespérément seule si tendre et si belle Amour est devenu amoureux de Psyché il a voulu la protéger se cacher de sa mère et quand Psyché désespérée et seule s’est trouvée sur le rocher en haut de la falaise Amour a envoyé Zéphyr le vent léger qui a porté doucement Psyché par-dessus la falaise par-dessus les montagnes et doucement il l’a portée comme en glissant jusque dans la vallée jusque sur la prairie où il l’a déposée et elle s’est dit que peut-être un dieu la protégeait alors elle s’est endormie fatiguée quand elle s’est réveillée elle était reposée elle s’est dressée elle a marché dans un sentier à travers un bosquet et elle est arrivée devant un palais comme elle n’avait jamais vu plus beau que tout ce qu’elle aurait pu imaginer un palais de marbre avec des colonnes. timidement elle a monté les marches elle est arrivée sous un portique elle a marché sur une mosaïque de pierres précieuses. à l’intérieur les murs étaient recouverts d’or et les plafonds étaient à caissons décorés d’ivoire elle était seule il n’y avait pas de gardien et les salles étaient décorées de trésors de tout ce qu’elle a- voyait de si beau comme elle n’avait jamais vu elle a marché dans le palais et elle a visité et tout à coup elle a entendu une voix qui lui disait [end]
[DD] mais ne sois pas si timide. tout ce qui est ici t’appartient. commande et nous t’obéirons veux-tu te reposer? veux-tu prendre un bain? veux-tu manger? [end]
[NS] alors elle s’est reposée elle est entrée dans une piscine et des mains la couvraient la séchaient la parfumaient et puis sous les colonnes face au jardin face aux fontaines il y avait un repas qui était prêt avec des vins fins et les mets les plus délicieux et pendant qu’elle goûtait aux friandises elle a entendu une voix qui chantait mais elle n’a pas vu ni le chanteur ni la chanteuse elle a entendu une sitar mais elle n’a pas vu le musicien. personne. alors après elle est allée dans la chambre. des mains invisibles et des voix invisibles l’ont aidée à se coucher et là il faisait nuit elle avait peur elle s’est demandée quel monstre allait venir la dévorer et dans la nuit elle a entendu un glissement furtif un souffle elle a senti une présence près d’elle et une voix désincarnée lui parlait mmm la rassurait son époux est venu dans la nuit et il est reparti avant le jour. le lendemain elle était seule avec les voix servantes et ainsi tous les jours les voix servantes toutes les nuits son amant invisible et le temps passait dans cette cage dorée. une nuit son mari lui a dit [end]
[DD] petite Psyché si tendre méfie-toi. un danger te menace tes sœurs demain t’appelleront là-haut sur la falaise bouche-toi les oreilles n’écoute pas de ce qui vient de ce côté-là méfie-toi si jamais tu les écoutais ça serait fini de nous. nous serions séparés pour toujours méfie-toi [end]
[NS] mais elle si fragile quand elle a su que ses sœurs allaient venir elle avait tellement envie de les voir elle a pleuré elle a supplié il lui a dit [end]
[DD] méfie-toi il ne faut pas les écouter [end]
[NS] mais le lendemain elle a tant per- pleuré elle était méconnaissable le soir et elle l’a tellement supplié il a cédé il lui a dit [end]
[DD] méfie-toi surtout ne les écoute pas si elles te demandent sss qui je suis ne leur réponds pas n’essaye pas de savoir qui je suis n’essaye pas de me voir ce serait tellement dangereux mais si tu veux réponds à tes sœurs parle-leur [end]
[NS] alors elle a demandé que Zéphyr aille les chercher il a dit que oui il lui a même dit qu’elle pourrait leur offrir tous les bijoux tous les cadeaux qu’elles voudraient et le lendemain il avait disparu comme toujours alors elle a entendu sur la falaise ses sœurs qui pleuraient qui criaient alors elle a envoyé Zéphyr les chercher et Zéphyr les a portées dans la prairie elle est allée au devant de ses sœurs elle a bavardé elle était tellement heureuse. ses sœurs l’ont suivie jusqu’au palais quand elles ont vu le palais quand elles ont monté les marches quand elles ont vu la somptuosité et tous les trésors qu'il renfermait elles ont senti leur cœur tordu par la jalousie elles ont demandé qui était son mari si elles pourraient le voir ? Psyché a répondu son mari était un jeune homme qui aimait la chasse et qui n’était pas là [end]
[DD] et quoi [end]
[NS RD] se sont-elles dit [end]
[DD] cette petite gourde mais elle habite le palais digne d’un dieu. et son mari est jeune. pourquoi pas beau ? et non. non un vieux mari. mais c’est pas juste [end]
[NS] et quand Psyché qui n’osait plus trop parler parce qu’elle avait tellement peur de trop en dire leur a offert des bijoux et puis les a vite renvoyées a demané à Zéphyr de les porter sur la falaise. quand elles se sont retrouvées toutes les deux leur venin mmm [end]
[fDD] la petite gourde mais quand on pense mais elle se prend pour une déesse mais tu as vu cette arrogance et un jeune mais un jeune dieu et nous. mais si tu voyais mon mari il est haut comme un petit banc et il est chauve comme une citrouille il est plus vieux que mon père [audience some laughter] [end]
[fDD] et moi le mien mais le mien il est malade tordu d’un rhumatisme l'amour il sait même pas ce que c’est et moi je suis comme une infirmière surmenée [audience some laughter]et elle elle se prélasse et les mains invisibles et elle commande au vent. [audience some laughter]oh vengeons-nous et vite [end]
[NS] alors elles sont rentrées au palais des parents elles n’ont pas dit que Psyché était en vie elles ont caché les colliers elles se sont griffées le visage elles se sont recouvertes de cendres et puis elles n’avaient qu’une hâte c’était revenir distiller leur venin dans le cœur de la tendre Psyché et à chaque fois Psyché si heureuse les faisait venir appelait Zéphyr leur offrait des cadeaux et elles disaient [end]
[DD] et ton mari il n’est pas là aujourd’hui ? [end]
[NS] et Psyché qui avait oublié ce qu’elle avait dit l’autre jour a dit [end]
[DD] euh c’est un marchand un un peu âgé il est parti pour ses affaires [end]
[NS] et les autres ont dit [end]
[DD] quoi ? un jour il est jeune un jour il est vieux mais elle l’a pas vu elle sait même pas qui c’est [end]
[NS] alors elles ont dit [end]
[DD] tu sais on dit là-bas près du fleuve il y a un monstre et on le sait de source sûre il y en a qui l’ont vu la bouche dégoulinant de sang il dévore des moutons peut-être des enfants et puis toi tu nous as dit que tu attendais un bébé et bien un de ces jours il vous dévorera peut-être toutes les deux [end]
[NS] et Psyché avait peur heh elle avait peur du monstre et elle aimait son mari et lui lui disait [end]
[DD] mais méfie-toi ne dis rien je t’en prie fais attention elles sont méchantes [end]
[NS] mais elle elle ne voulait pas croire un soir il lui a dit [end]
[DD] tu sais tu attends un enfant et si tu gardes notre secret il sera dieu mais si tu dis quelque chose il sera mortel [end]
[NS] et elle elle était toute heureuse alors les sœurs quand elles sont revenues quand elles ont su elles lui ont dit [end]
[DD] cette bête il faut que tu la tues avant qu’elle te mange alors trouve un rasoir bien affûté cache-le garde le secret et puis prends une lampe cache-la sous une marmite et quand il dormira bien tranche la tête du monstre nous (nous) serons là près de toi nous t’aiderons et tu épouseras un humain [end]
[NS] et puis elles elles sont parties très vite elles se sont embarquées elles sont parties loin de cet endroit qui était dangereux pour elles et Psyché est restée seule abasourdie et en même temps excitée parfois aimant son mari invisible parfois ayant peur croyant ses sœurs voulant tuer cette bête alors dans un moment de courage elle a cherché le rasoir elle l’a caché elle a cherché la lampe elle l’a recouverte d’une marmite et puis elle a attendu attendu que son mari ne soit qu’un souffle qu’il dorme et là elle a pris le rasoir elle a enlevé la marmite et elle a soulevé la lampe pour voir le monstre et elle a vu le plus délicieux des monstres le plus charmant Amour lui-même si jeune si bouclé si doux il avait ses grandes ailes qui bougeaient à peine. juste un petit duvet qui bougeait qu- au souffle du vent elle a vu au pied de lui le carquois et les flèches et elle a su que c’était Amour alors elle a pris une flèche et elle l’a passée sur son pouce comme ça pour voir et elle s'est piquée une gouttelette de sang est sortie et Psyché est devenue amoureuse de l’Amour. alors pleine d’amour pour celui qu’elle voyait elle a voulu le caresser l’embrasser elle s’est penchée et une goutte d’huile bouillante est tombée sur son épaule droite. Amour s’est dressé il a bondi il est sorti sans un mot. elle elle s’est accrochée à sa jambe droite il l’a emportée dans les airs jusque dans les nuages et puis épuisée elle est retombée dans l’herbe sans se faire de mal parce qu’il l’avait protégée et du haut d’un cyprès il lui a dit [end]
[DD] pauvre Psyché pourquoi as-tu écouté tes sœurs je t’avais pourtant mise en garde tu n’as pas eu confiance en moi tu as cru que j’étais une bête et tu as voulu me tuer. pour ta punition tu ne me verras plus jamais [end]
[NS] et il s’est envolé à tire-d’aile comme un oiseau [end]